(Gill') - Clair-Obscur - end

01.
Assise sur une chaise, la gamine regardait les grands parlaient entre eux avec des termes si compliqués qu'elle n'arrivait pas à tout comprendre. Sang-de-bourbe. Fédération internationale des Mages et Sorciers. Impertinence. Psychomagie. Trop de termes. Trop de mots. Pourtant, elle s'accrochait du haut de ses cinq ans. Assise comme on le lui avait appris, avec le dos bien droit. Un joli sourire sur les lèvres, ni trop forcé, ni pas assez. Une poupée de cire au teint frais et aux joues rosies. Parfois, elle observe ceux qui dansent, les enviant de pouvoir évoluer avec autant de grâce, aimant par dessus tout ce sentiment de liberté que procure la danse et ses pas pourtant orchestrés. Et puis soudain, un petit garçon s’assoit à ses côtés. Plus bougon qu'elle. Moins droit, moins calme mais tout aussi souriant. On verrait presque ses dents. " Tu veux voir un truc génial ? " Et la gamine hoche affirmativement de la tête. Bien entendu, quelle question. Le petit garçon prend alors sa main dans la sienne et l'entraîne plus loin en zigzaguant entre les grandes personnes en riant allègrement, provoquant le même rire chez la petite fille. Comme pour se cacher du regard désapprobateur des adultes, il glisse sous la table en l'entraînant, cachés au regard de tous. " Regarde." Son ton est émerveillé, autant que les yeux de la gamine lorsqu'elle découvre un vif d'or scintillant dans sa main qui s'envole délicatement autour d'eux. Il la frôle de ses ailes et elle sursaute en gloussant, frissonnant sous son touché. Il sourit lui aussi en tentant d'attraper le vif d'or qui finalement s'échappe au loin en glissant sous le drap de la nappe. Son regard mi-horrifié, mi-amusé, se tourne vers elle et lorsqu'ils entendent quelques cris retentir ils se mettent à rire ensemble, cachés sous la table. " Je suis James." se présenta-t-il en tendant sa main devant la jeune fille. Elle lui rendit son sourire avant de se présenter à son tour " Gillian." Le début de toute une histoire.


02.
Dehors, la nuit noire régnait en maître alors que la pluie s'abattait violemment contre les carreaux, temps idéal du mois de Novembre. La petite fille dort paisiblement jusqu'à ce qu'un orage un peu trop violent ne finisse pas l'éveiller complètement, zébrant sa chambre dans des couleurs terrifiantes pour ses huit ans. Elle tente d'être courageuse mais à force de trembler finit par se lever de son lit pour se hisser sans bruit jusqu'à la porte de ses portes en serrant son coussin contre elle. Pourtant, elle hésite. Il n'a jamais été de coutume de venir réveiller ses parents à cause de terreurs nocturnes et son père n'apprécie guère ce comportement. L'éducation a toujours été stricte bien que juste chez les Rowle... mais on ne supporte pas la faiblesse. Sans pour autant la blâmer, on fait en sorte qu'elle n'existe pas, masqué derrière des faux-semblants et un énorme contrôle de soi. Pourtant, elle tremble la gamine. Si fort qu'elle en a mal aux dents. Mais un bruit l'attire, sa curiosité se trouvant exacerbée. Elle se penche par la balustrade alors que l'elfe de maison ouvre la grande porte, rapidement précédé par son paternel, surement excédé de devoir accueillir quelqu'un à cette heure-ci. Une silhouette encapuchonnée finit par entrer. Gillian ne la reconnaît pas. Elle ne l'a même jamais vu auparavant. Qui est-ce ? La curiosité la laisse patente là, sur le sol du premier étage jusqu'à ce que le plop de l'elfe de maison ne retentisse à ses côtés, lui provoquant un cri de stupeur. " Mademoiselle ne devrait pas être en-dehors du lit à cette heure-ci. Mademoiselle devrait dormir. " Elle ne dit mot et se retourne, terrifiée de croiser le regard courroucé et noir de son paternel mais celui-ci a disparu. Tout comme la silhouette encapuchonnée. Elle finira par aller se glisser furtivement dans le lit de son frère aîné, sans mot en tâchant de prendre le moins de place pour ne pas le déranger. Ce dernier se réveillera mais ne dira rien. Leur entente a toujours été amicale car bien qu'aimant sa petite sœur, Blaine se devait d'être distant. De cinq ans son aîné, son éducation avait déjà commencé, parfait petit héritier mâle.

03.
Poudlard. La grande aventure. Partagée entre la crainte d'être livrée à elle-même du haut de ses onze ans et celle de vivre une aventure avec la découverte d'un nouveau monde et de nouveaux camarades, la petite Gillian hâte le pas pour arriver sur le quai neuf trois-quart sous le regard désapprobateur de son père et les houspillements de sa mère. Alors, elle se contient, prenant sur elle en retrouvant sa contenance et ses manières. Quelques familles de sang-purs viennent les saluer, certains demandant même à leurs aînés d'aider la petite Rowle à "bien" s’intégrer au château sous les paroles inquiètes de sa mère. Les Nott s'en chargèrent, leur fils ayant le même âge que Gillian et faisant son entrée également. Le gamin lui sourit avec fierté et arrogance, ce qui fait naître de la crainte et de l'amertume chez la jeune fille, sans raison apparente. Elle finit par monter dans le wagon flambant rouge qui l'emmène au loin alors qu'elle sent son cœur se serrer d'angoisse. Allant chercher ses affaires entre les différentes cabines, elle finit par heurter quelqu'un de dos. " Oh pardon..." et elle le reconnaît ce garçon avec les cheveux bruns en pagaille. " Salut Gillian ! Tu te souviens de moi ? " Le petit garçon au vif d'or, comme celui brodé sur son tee-shirt actuellement d'ailleurs. " Bien sûr, bonjour James.". Et comme une habitude, il lui prend la main pour l'embarquer jusqu'à son compartiment, ayant de nouveau une trouvaille à lui montrer. Cette fois-ci, il s'agit d'une course de chocogrenouille avec ses cousins et amis et si la jeune fille trouve çà légèrement dégoûtant vu qu'il s'agissait d'arriver à attraper la chocogrenouille à pleines dents avant qu'elle ne s'enfuit, elle ne dit rien et rigole avec les autres. Mais Aidan Nott finit par arriver en faisant glisser la porte vitrée sans mot ni regard pour les autres occupants du compartiment, ce qui irrite l'un des amis de James qui rétorque. Le gamin le regarde avec dédain avant de se tourner vers Gillian. " J'ai retrouvé ta valise. Viens. " Alors, elle se lève avec un sourire d'excuse auprès des autres et part avec son nouveau chaperon jusqu'à ce qu'une main ne la retienne dans le couloir. " On se voit plus tard. " James venait de la retenir pour laisser dans sa main une patacitrouille, tout sourire. Elle hoche la tête pour confirmer le rendez-vous et s'éloigne en se retournant parfois pour répondre à ses coucous. Arrivée jusqu'à sa place en face d'Aidan, elle avale la patacitrouille en la savourant. Ses parents ne voulaient jamais qu'elle ne mange des sucreries. Apparemment cela faisait bobo aux dents et prendre des kilos, si néfastes pour une demoiselle - dixit sa mère. " Tu ne devrais pas le revoir. Ton père n'apprécierait pas. " déclara alors Aidan en la regardant. Surprise, la fillette relève le regard vers lui " Pourquoi ? " " C'est un Potter. Le fils du Survivant. " Elle ne comprend pas et reste silencieuse. " Il est gentil. " répond-elle simplement en haussant les épaules, déjà conquise. " Il est comme son père." rétorque le garçon sèchement, visiblement mécontent.
Et la répartition finit par arriver, envoyant chacun des protagonistes dans une maison différente. James à Gryffondor. Aidan à Serpentard. Gillian à Serdaigle.

04.
Cinq ans ont passé et les BUSES étant pour bientôt, Gillian s'était hissée jusqu'en haut de la tour d'astronomie en pleine journée afin d'avoir un peu de tranquillité pour travailler. De là-haut, elle pouvait avoir une vue imprenable sur le ciel sans avoir la majorité des étudiants qui rient et la déconcentrent comme dans le parc. Parc qu'elle pouvait apercevoir si elle se penchait un peu mais ayant peur de tomber à cause de la hauteur, elle ne s'approchait pas beaucoup malgré son amour pour le ciel. L'astronomie la passionnait mais son père lui avait fait comprendre qu'il ne s'agissait pas d'un métier. Alors, elle s'était rabattue sur la médicomagie, même si on lui avait clairement fait comprendre qu'une fois mariée, elle ne pourrait pas exercer et se devrait de savoir tenir correctement une demeure. Pourtant, elle refusait de mettre un trait sur ses ambitions et ses espoirs de pouvoir un jour être indépendante. " Je savais que je te trouverais là ! " Sursautant de surprise, Gillian en fit voler sa plume et tenta de la rattraper avant qu'elle ne tâche son parchemin mais James fut plus rapide. Soupirant d'aise et de réconfort de voir son parchemin intacte, Gillian tourna un regard vers le jeune homme. " Tu n'as pas un entrainement ? " lui demanda-t-elle en retour. La Lion rigole en se moquant d'elle. " Gil', il est terminé. La nuit commence à tomber, regarde. Tes bouquins te font perdre la tête, c'est l'heure du repas. Tu sais qu'on ne se nourrit pas avec des bouquins. " Elle fait mine de le frapper sur le tibia avec son manuel de métamorphose en se retenant de rire. " T'es bête. Si on pouvait les manger, je t'aurais déjà fais ingurgité la majorité des livres de bienséance. " rétorque-t-elle en tentant de dissimuler son sourire fier derrière ses lippes. " Princesse ! " "Gnome !" " Harpie défraîchie." Les semis-insultes fusèrent sous le coup de l'amusement alors qu'il l'aidait à se relever avec surement trop d'entrain car elle fut trop entraînée vers l'avant et du se retenir à ses épaules. Sourires gênés. Émois d'adolescents. Jusqu'à ce qu'un groupe d'élèves de troisième années venant prendre leur cours d'astronomie ne les interrompent, les faisant fuir en riant.
Mais les beaux jours n'étaient pas fais pour rester et les disputes entre amis finissent toujours par arriver. Même aux meilleurs. Alors qu'ils avaient rejoins un groupe d'amis plus ou moins communs, une fille de sixième année vient demander à James s'il acceptait d'être son cavalier pour le bal. Tout fier d'être demandé par une fille, de surcroît une année au-dessus de lui, il accepta, pressé par ses potes aux alentours. Coïncidence ou non mais depuis ce jour, les relations entre Gillian et James n'ont plus jamais été au beau fixe sans qu'aucun des deux n'en sache la raison. La Serdaigle ne supportait plus d'être en présence des copines du Lion qui lui horrifiait sa relation amicale bancale avec le serpentard. Les tensions finirent par créer des disputes puis des silences. Pourtant, chacun se cherchait constamment du regard sans jamais se l'admettre. Trop fiers et orgueilleux, chacun. Les semaines passèrent, puis les mois et rien ne changea. Une belle amitié mit en lambeau.

05.
Tu ne pouvais le croire et pourtant une petite voix dans ta tête t'assommer avec la rumeur qu'Aidan venait de t'apprendre. Mai commençait à revenir, entraînant avec lui le bourgeon des fleurs et pourtant tu n'en avais cure. Tourmentée par tes propres démons et ta propre peur, tu te fis même sermonnée par le professeur de botanique, inattentive au cours. La première fois de toute ta vie. Rangeant tes affaires avec rage, tu attendis que tous ne soient sortis avant d'aller t'excuser platement et poliment envers le professeur qui ne fut surpris ni par tes manières, ni de ton écart de conduite. Le seul à retenir pour l'instant. Sortant de la serre, tu ne savais si tu étais en colère ou dévastée. Ainsi dont, tes parents avaient réellement décidé de te fiancer et pensez sérieusement au fils Nott. Une chaîne de fer s'enroulait autour de ta cheville sans que tu ne puisses t'échapper, ayant beau courir pour être finalement rattrapée. Peut-être n'était-ce qu'une vilaine rumeur que le serpentard t'avait dit pour se venger de ton refus de sortir avec lui. Lui avec qui tu étais pourtant amie. Néanmoins, ses propos n'étaient pas dénaturés de sens. Bouleversée, tu foulais l'herbe du pied, songeuse, sans te rendre compte du nouveau tourment que tu allais vivre. " Qu'est-ce qui va pas ? " La voix est sèche, pourtant, tu l'as reconnais entre mille. Relevant légèrement la tête, tu n'as pas la tête à te disputer de nouveau. Surtout pas avec lui. " Rien " marmonne-t-elle en tentant de passer sans s'arrêter, ce qui fut peine perdue lorsque James lui attrapa le bras. " Je croyais que tu ne me mentais jamais. Ou même çà, ça s'est arrêté ? " Ils n'ont jamais enterré la hache de guerre au final, trop troublés par l'adolescence et les états d'âmes que cela déclenchaient en eux sans les comprendre. Chercher à les analyser serait leurs donner vie ou tout du moins un impact trop grand qu'ils n'étaient pas prêts à accepter, chacun de leurs côtés. Gillian pour cette épée de damoclès pendant au-dessus de sa tête et la peur de changer une complicité qui a finalement été changée. James, pour ses propres raisons. " Lâche-moi James..." Tu n'as pas la force de se battre, pas aujourd'hui. Et il le sent, ce qui l'inquiète d'autant plus. La Serdaigle n'était pas dû genre à baisser les bras, persistante même dans les plus gros échecs, trop perfectionniste surement. Et surtout pas lorsqu'il était question de leurs joutes verbales. C'était la manière qu'ils avaient trouvé de toujours rester en contact, bernant personne à part eux-mêmes. Tu tentes de t'échapper mais sa prise se fait plus forte et bien que tu aimais penser que tu en avais autant que lui, tu savais que ce n'était pas vrai. Ego féministe. " Tu ne devrais pas mettre ses lunettes, ca gâche ton visage. " dit-il en enlevant la paire en la faisant glisser sur son nez. " Ca ne t'empêchera pas de pleurer si tu es triste. " Sa voix est gentille et douce. Comme un baume. Mais le jeune homme a touché ton point sensible : ta fierté. Dire à voix haute tes états d'âme fait revivre un semblant de contenance mais tu ne veux pas lui parler de ce qui t'enserre le cœur. Aidan et James se détestaient bien assez cordialement pour déclencher un énième prétexte de bagarre. Surtout pour des histoires ne te concernant que seule, te refusant depuis toujours d'impliquer qui que se soit, aussi difficile que cela ne puisse l'être. Pourtant, c'est bel et bien la voix de la midinette qui l'appelle au loin qui réveille ta hargne. " Je me préfère avec. " Ce qui était plus ou moins vrai. Piquée, tu reprends ton bien que tu glisses furieusement sur ton nez avant de faire demi-tour. " Harpie dégarnie !" L'insulte - autrefois moquerie puérile mais complice - fut lancée dans les airs... attendant toujours une réponse à l'heure actuelle. Le Lion fulmine dans sa persévérance mais ne comprenant pas non plus qu'il est également l'acteur de son éloignement.

06.
Les vacances estivales ont permis d'éclaircir les doutes de la jeune fille sur son avenir... qui s'annonça aussi sombre que l'abysse dans lequel elle tombait. La voilà belle et bien fiancée à Nott, sans qu'elle ne puisse avoir son mot à dire. Arrogant, Aidan pavane en l'oubliant, comme s'il souhaitait profiter de sa jeunesse avant de se retrouver marié pour l'éternité à la fin de leur septième année. Plus que deux années de liberté. Mais ce qu'il s'accorde, il ne le conçoit pas à sa "fiancée". L'accord entre leurs familles restant pour l'instant dans l'ombre, il se fait un malin plaisir à s'immiscer dans sa vie alors qu'elle cherche à le repousser au loin. Le serpent s'était assombri avec les années, rendant toute discussion difficile, notamment depuis ses élans d'hormones dues à l'adolescence. Toujours courtois. Toujours éduqué mais souvent trop insistant. Or, les nouvelles de la Gazette ne sont guère plus joyeuses depuis l'annonce de la mort d'une cracmole sans explication aucune. Pauvre Mr Figg, laissée sans vie sur le perron de sa porte. Refermant le journal à côté de son assiette, Gillian frisonne en jetant un coup d'oeil à la table des serpentards. Tout finit par se resserrer et elle comprend mieux les explications à demi-mots de son paternel. Son éducation sur le fait de veiller à ses fréquentations et de ne surtout pas converser avec des nés-moldus. Qu'ils pouvaient exister tant qu'ils n'interféraient pas dans leur vie. Si cadrée, si prévisible. Un ennui mortel pour la demoiselle. Pourtant, ce dernier lui a fais subtilement comprendre qu'il attendait qu'elle accepte son destin, celui qu'il avait tracé pour elle. Celui d’adhérer à cette idéologie si noire en la faisant prospérer de la même façon que lui : dans l'ombre et l'ignorance les plus complètes. C'était pour cette seule raison qui ne l'avait jamais puni pour son amitié avec des Potter. Tromper l'ennemi, s'introduire. Mais la jeune aigle n'en a aucune envie, se sentant emprisonnée sous une coupe dont elle n'arrive pas à s'en sortir, écrouer par l'autorité parentale, exacerbée par une idéologie qui au final n'est pas la sienne... tout cela parce qu'un petit garçon aux cheveux ébouriffés lui a montré un vif d'or, dix ans de cela. Piégée. Forcée.